Le théâtre Graslin occupé : La mobilisation des artistes, techniciens et acteurs culturels prend de l’ampleur et s’adresse aujourd’hui à tous les salariés précaires les plus touchés par la crise
Le Théâtre Graslin occupé
Une semaine après l’occupation du théâtre de l’Odéon à Paris, ce 10 mars 2021, une assemblée générale des acteurs de la culture a décidé d’occuper le théâtre Graslin à Nantes. D’autres théâtres et lieux culturels leur emboîtent le pas et le mouvement est en train d’essaimer.
Avec la crise sanitaire, un dispositif a été mis en place pour pérenniser le système d’indemnisations des intermittents du spectacle (artistes et techniciens) et leur permettre de survivre. Après diverses négociations, la date d’expiration de « l’année blanche » a été fixée en août 2021, en supposant que les activités auraient repris normalement à cette date. Toutefois cette aide laissait de côté les personnels en début de carrière et les femmes enceintes. Aucune mesure ne concernait les autres artistes, comme les plasticien(ne)s, les auteurs et autrices. Et les pratiques artistiques des amateurs restaient oubliées, négligées, interdites !
La culture sacrifiée
Or depuis le début de la crise, le gouvernement à fait le choix de considérer la culture comme « non essentielle ». Alors que cette définition évolue au grès de la pression des lobbys lors des confinements successifs, seuls les lieux culturels restent définitivement fermés et ceci sans « intermittence ».
Ce choix n’a rien d’innocent car depuis un an dans ce contexte de crise sanitaire, alors qu’un conseil sanitaire, constitué d’un groupe de personnes non élu.e.s , réduit nos libertés et demande aux citoyen.ne.s un effort considérable, il est jugé préférable de museler ce lieu « subversif » qu’est la CULTURE. Les choix politiques pris jusqu’à présent, sous couvert de raisons sanitaires, en disent long sur les priorités de ce gouvernement, qui refuse toujours de considérer la culture comme un élément essentiel dans nos vies.
Roselyne Bachelot a tenté de désamorcer le mouvement en se rendant au théâtre de l’Odéon. Elle n’avait rien à leur proposer et s’est fait renvoyer dans ses bureaux. Cette visite n’a pas eu l’effet escompté, au contraire, puisque l’occupation du théâtre Graslin a immédiatement suivi.
20 millions d’€, voilà la réponse du gouvernement alors que c’est au minimum plus de 200 millions d’€ qui seraient nécessaires.
Ces premières oboles sont donc jugées largement insuffisantes par les professionnels de la culture.
Le mouvement d’occupation des théâtres prend de l’ampleur. Démarré début mars au théâtre parisien de l’odéon puis au théâtre Graslin à Nantes, c’est maintenant plus de 70 lieux qui sont occupés.
Privés de la possibilité d’exercer leur métier, l’ensemble des professionnels de la culture tels que les artistes, les auteurs et autrices, les plasticiens, les comédiens non intermittents ont rejoint les intermittents du spectacle et tous ensemble se mobilisent pour faire entendre leurs revendications. En effet, s’ils demandent la réouverture des lieux culturels avec un calendrier pour retravailler, il est indispensable qu’il soit accompagné d’un réel plan de sauvegarde de l’emploi.
D’autre part, ils demandent aussi la reconduction de l’année blanche au-delà de cet été 2021 pour l’année à venir car de nombreux professionnels de la culture verraient leurs droits sociaux supprimés, le temps de reconstituer les conditions de réouverture de droits par leur travail.
Mais si ce mouvement est sectoriel, il n’est pas corporatiste puisqu’il porte aussi sur des revendications pour les précaires dans leur ensemble. Il n’est pas question d’entrevoir seulement le prolongement de l’année blanche car dans cette période de crise économique annoncée, alors que le nombre de chômeurs ira croissant, les acteurs de la culture demandent la suppression pure et simple de la réforme de l’assurance chômage. Cette réforme, bien au-delà du milieu culturel, impacterait fortement à la baisse les indemnisations de tous les chômeurs.
Quels soutiens locaux
Le mouvement d’occupation des théâtres compte chaque jour de nouveaux soutiens tant par les organisations politiques et syndicales que par la population qui participent régulièrement aux agoras organisées tous les après-midi sur la place Graslin pour permettre l’expression des souffrances de tout un ensemble de professions en lutte. Les lieux culturels sont aujourd’hui des espaces de rassemblement des luttes actuelles puisqu’elles sont la plupart du temps le lieu de fin des manifestations et pourraient devenir un lien unificateur de toutes ces revendications et un lieu de la convergence des luttes.
Par ailleurs, quels soutiens peuvent apporter les collectivités locales ?
S’il y a des femmes A la demande des élu.e.s délégué.e.s à la culture de la majorité municipale nantaise, des rencontres sont régulièrement organisés avec les occupant.e.s de l’opéra Graslin, afin d’aborder différents thèmes et entrevoir sous quelles formes la municipalité pourrait apporter un soutien tant logistique, financier que revendicatif.
L’Association de Veille Écologiste et Citoyenne (AVEC [Nantes]) soutient cette démarche et demande à la municipalité de Nantes de soutenir l’engagement de tous les lieux culturels nantais dans cette mobilisation et d’envisager avec eux la possibilité d’une ré ouverture locale de certains d’entre eux.
La culture est essentielle à notre système économique, mais aussi un secteur indispensable à l’épanouissement, à l’émancipation et l’esprit critique des individus, aux liens sociaux. Pour toutes ces raisons, L’Association de Veille Écologiste et Citoyenne (AVEC [Nantes]), soutient ce mouvement qui touche tous les acteur.trice.s de notre société et appelle à soutenir cet élan d’expression et de de liberté en participant massivement aux agoras des après-midi festifs place Graslin.
Nous suivons le mouvement, et nous ne manquerons pas de vous informer de la suite.